Je m'en vais...

J'allais me faire démolir. Je le sentais venir comme le nez au milieu de la figure. C'était une importante décision que je m’apprêtais à prendre. Décision qui pouvait avoir des répercussions sur d'autres personnes que moi. Mais j'en étais décidée. Caliska m  'en avait convaincue. En effet, une semaine auparavant, je rencontrais Caliska qui me fit une proposition très spéciale qui me plut sur le champ. Cette proposition, cette porte ouverte sur la liberté m'obsédait, je n'en dormais plus, il fallait que je le fasse.
En l'absence de mon père (Wyatt McCallister, parti je ne sais où pour je ne sais quelle affaire très particulière) je devais me référer à mon oncle, le très cher Keagan McCallister. Mon père (donc forcément moi aussi) n'a jamais vraiment été en très bon termes avec lui... Rivalité entre eux je suppose. Je n'étais pas aux anges de devoir lui en parler, mais j'étais obligée. Cette décision me concernait principalement mais elle prenait aussi en compte d'autres personnes... des bêtas mais aussi mon alpha (mon père... mais il n'était pas là). Je ne suis pas du genre à penser aux autres, surtout pas à eux. Mais là c'était différent... Il y avait une question d'honneur et de fierté de ne pas faire ça en douce... J'allais me faire tuer.
Ce jour-là, il pleuvait. Les gouttes d'eau léchaient mes joues, trempaient mes cheveux. Et j'avais donné rendez-vous à  Keagan dans la forêt. J'allais vraiment me faire massacrer.
Plus je m'avançais dans la forêt plus j'avais peur. Je craignais la réaction de mon oncle. Je ne savais pas vraiment comment il pouvait réagir à ce que j'avais à lui annoncer... Mais le silence, lourd comme du plomb, et l'obscurité profonde qui assiégeaient la forêt, se livrant à un combat sans merci avec la pluie diluvienne, m'apaisaient. Me reposaient. Mes sens se réveillaient. Il y avait si longtemps que je n'étais plus retournée seule dans la nuit, hors du foyer. Depuis que mon père était parti en fait.
On ne s'aimait pas, mais je ne voulais pas me le mettre à dos. J'allais devoir être diplomate... Et patiente... Lui dire calmement, observer chacune de ses réactions, analyser chacune de ses paroles... Trouver une faille, et frapper... J'allais lui montrer que ce qu'une digne fille de Wyatt McCallister était capable de faire. J'allais me défendre.
Et, accoudé à un arbre, les gouttes de pluie tombant en cadence régulière sur son parapluie noir, je vis Keagan. Je jetai un rapide coup d'oeil à ma montre. 18 heures 48. Il était à l'heure et même en avance dis-donc. Je m'approchais. Il ne me regardais pas mais il m'avait vue, du moins entendue, c'était obligé.
J'approchais. Soudain le charme jeté par les forces de la nature environnante fut levé et la pression se fit plus puissante. J'avais en fait terriblement peur de lui dire mais une pensée soudaine m'apaisa. Si il me touchait, il aurait à faire à Wyatt.
Un jour où l'autre il faudrait que j'arrête de toujours compter sur mon père.
J'arrivais à son niveau, je plantai mes deux pieds dans le sol. Je croisai les bras sous ma poitrine et pris appui sur ma jambe droite.
Je lui lançai  :
Et mince, moi qui voulais être diplomate, c'était loupé. Mais bon, c'était légèrement trop tard....